Depuis les trois dernières semaines, j'ai planché sur une planche de bois... En effet, j'ai décidé d'offrir à "La-Marie-de-X-Boy" (sa première gardienne qui est désormais une amie très chère à notre famille!) une toise de croissance en bois pour Bébé-Éléonore qui naîtra dans moins de deux semaines... Évidemment, peindre sur du bois n'est pas ma tâche artistique de prédilection et fallait-il en plus que j'augmente le coefficient de difficulté en choisissant une planche de pin torréfié...
Pour les néophytes tels que moi-même, sachez que peindre sur du bois torréfié, ça ne se fait pas SANS sabler au préalable... et ensuite, ça en prend de la couche de peinture, les amis!!! Oh là là... pour obtenir un blanc pur et uniforme, ça m'aura pris deux couches de conditionneur pour bois, deux couches de gesso et six couches de peinture blanche à l'acrylique.
Au final, la toise est splendide. Originale et pile-poile dans le thématique Harry Potter qui décore déjà la chambre de bébé. Mais hier matin, alors que je voulais vernir au vaporisateur ladite-toise-en-bois, je me suis butée à un X-Man-protecteur-de-son-patio.
- Non, X-Mom... tu ne vas PAS utiliser ton spray SUR le patio... La dernière fois que tu y as bizouné tes oeuvres d'art, c'est resté taché jusqu'à ce qu'on le démolisse... Et là, le patio, il est neuf...
- Dah, je sais bien que le patio est neuf... Tsss... T'es ben peureux... c'est pas de la peinture en spray, c'est du vernis... c'est i-n-c-o-l-o-r-e et qu'est-ce que ça pourrait bien faire que des bouts de patio soient vernis?
- X-Mom... essaye pas... pis va sur le terrain...
- Pis le gazon, lui? C'est pas grave s'il est verni? Ta tondeuse va peut-être étouffer?!?
Je suis sortie avec ma planche en rigolant et surtout, en ayant enfilé le vieux kangourou laitte de X-Man afin de ne pas "me" salir... X-Man n'a pas bronché, c'est son chandail-à-bizounage-sale-dehors...
J'ai donc appuyé ma planche de 7 pieds contre l'érable au fond de la cour et j'ai observé le sens du vent "avant" d'appuyer sur le vaporisateur... On ne me le fait plus, le coup du "spray-dans-face"...
Juste avant que je ne commence à vaporiser, oh, un mignon petit oiseau est venu me faire un coucou de l'autre côté du tronc, juste à la hauteur de mes yeux... Oh... moi qui adoooore les oiseaux, je me suis mise à lui jaser ça... à lui demander s'il la trouvait jolie, la "Edwidge" (la chouette de Harry Potter) qui était peinte dans le bas de la toise... Le petit oiseau restait là, trop mignon, à me regarder et tranquillement, il a continué à grimper le tronc jusqu'aux premières branches où il s'est installé pour chantonner ses réponses à mes questions.
J'ai vaporisé la planche. Attendu 5 minutes. Donné une deuxième couche. Puis, au moment de la saisir pour rentrer cette dernière au bercail, j'ai vu le petit oiseau quitter l'arbre. Je l'ai salué et j'ai remarqué une petite goutte blanche dans le haut de la toise... ??? Je n'avais pourtant PAS utilisé de peinture blanche dans le haut... tous les chiffres sont noirs..
J'ai baissé les yeux, et c'est là que j'ai remarqué une traînée de blanc qui descendait au centre de la toise... Ah ben NON!!!!!!! Cet oiseau a RÉELLEMENT fait caca SUR ma planche?!? J'ai hurlé et de rire et de surprise... et là, ce fût la panique... car avec quoi j'essuie ça, moi, du caca d'oiseau? Ça va sécher ben raide dans le vernis pis ça n'a pas d'affaire-là!!!
Sans réfléchir, j'ai pris mes doigts... puis les ai essuyés sur le chandail de X-Man. Ben oui...
Ensuite, je suis rentrée en hurlant qu'un oiseau avait chié sur ma planche... ce qui n'a pas surpris X-Man qui m'a dit ceci : "Ben tsé, X-Mom... à qui d'autre ça pouvait arriver?"...
J'ai répliqué, en me lavant vigoureusement les mains, "que ça ne serait pas arrivé si j'avais verni la planche sur le patio"... et j'ai murmuré que son chandail essuyait vraiment bien les tits-cacas-d'oiseaux...
Gnark gnark.
***
Hier, à 11h15, X-Boy avait un énième rendez-vous à la clinique d'urgence pédiatrique. Parce que bon, sa saga d'otite-eczéma ne semble pas près de se terminer, même après 9 semaines de traitement. Comme je ne peux toujours pas soulever la gamin, X-Man devait nous accompagner au rendez-vous. Ainsi, en arrivant à la clinique, il a grimpé le fauteuil sur le trottoir (car les accès pour handicapés ne sont pas toujours de niveau, sachez-le) et il est retourné dans la voiture pour continuer de travailler dans ses dossiers.
On a eu la chance de voir un pédiatre-allumé qui, lorsque j'ai exigé de voir un dermatologue ou un ORL en urgence a tout de suite opiné. Ce pédiatre avait déjà vu X-Boy dans cette saga et il était tout aussi découragé que X-Boy et moi de nous revoir pour la même histoire... Il a donc prescrit un nouveau traitement à X-Boy qui consiste à éliminer la possibilité qu'un champignon se soit installé dans le conduit auditif et nous a demandé de continuer le traitement pour l'eczéma en attendant de voir un dermatologue... car si on peut enrayer le problème avant la consultation, ce sera tant mieux pour tout le monde...
Je suis donc repartie avec X-Boy (eh oui!) et la référence à remettre au bureau des spécialistes qui se trouve dans le même bâtiment, au cinquième étage.
Il faut savoir qu'en temps de COVID, et surtout parce que la clinique se trouve en zone rouge, prendre l'ascenseur s'avère périlleux. En effet, un maximum de trois personnes est permis et c'est un gardien qui appuie sur les boutons. Ainsi, pour passer du 4ème au 5ème étage, j'ai dû attendre quinze minutes. Et même si X-Boy avait été capable de marcher, nous n'aurions pas pu prendre les escaliers, car ils sont fermés au public... un gardien se tient devant la porte des escaliers pour nous le rappeler.
Ainsi, quand nous sommes arrivés à la clinique des spécialistes, j'ai fièrement brandi le papier de référence sur lequel il est inscrit "urgent". La jeune secrétaire a saisi le papier, l'a rapidement lu et a quitté son poste pour aller discuter avec une de ses collègues savamment cachée derrière un paravent. Elle est revenue et m'a froidement redonné le papier par la fente du plexiglas où il est spécifié qu'aucune violence verbale ne sera tolérée.
- Désolée, Madame, mais je ne peux pas prendre votre référence.
- ??? Je me suis trompée de bureau? Pourtant, c'est inscrit qu'il y a des dermatologues ici... et c'est la clinique de pédiatrie du 4ème qui m'envoie directement...
- Oui, vous êtes au bon endroit... mais je ne peux pas prendre le papier, car ce n'est pas la procédure.
- Ok... et c'est quoi la procédure?, ai-je répondu en me disant que ce matin, un oiseau avait chié sur mon projet d'arts et que ça me tentait moyen de vivre ce genre de situation style-maison-des-fous-dans-Astérix...
- Il faut que vous me faxiez le papier.
- !?! C'est une blague?
- Non, vous devez me faxer le papier.
J'ai hurlé d'un rire sarcastique à donner froid dans le dos. C'est le mois des sorcières, après tout.
- Vous êtes sérieuse, là? Et vous croyez quoi au juste? Que j'ai un fax dans ma sacoche?
Elle a rougi. Dans la salle d'attente, le silence s'est installé. J'ai ressenti un certain vertige à "être la fatigante qui gueule dans une clinique", puis je me suis dit que non, ça n'allait pas se terminer aussi facilement. Car après douze ans à naviguer dans les vagues du fameux système de santé, j'ai trop souvent constaté que les gens abdiquent et courbent l'échine devant de telles idioties bureaucratiques... Les gens (dont j'ai souvent fait partie, à mon grand dam) finissent par dire "ah ben, si c'est de même..." et vont ensuite râler et se plaindre à leurs proches de la situation...
Mais si tout le monde continue d'accepter sans rien dire des situations aussi imbéciles, rien ne changera, non? J'ai décidé de revêtir mon habit de Jeanne-D'arc-défenderesse-des-prisonniers-du-système et de revendiquer un droit à la logique qui caractérise pourtant l'humain, bâtard...
- Ok... je n'ai pas de fax là là, dans mes mains... mais j'ai un PAPIER... vous le voyez et vous l'avez même PRIS dans vos mains tantôt... Me semble que ça ne se peut pas que je vive ça en ce moment...
- ...
- Vous croyez sincèrement qu'en temps de COVID et surtout ICI, en zone ROUGE, c'est idéal pour moi et mon fils à m-o-b-i-l-i-t-é r-é-d-u-i-t-e de sortir en duo dans une pharmacie pour faire un tit-fax alors que l'on est ICI, DEVANT VOUS et que VOUS travaillez pour le spécialiste dans le même bureau?!?
- Euh... ben si c'est plus simple, envoyez-le moi par courriel.
- Hein? Non, je rêve... pincez-moi quelqu'un... Tu (je me suis mise à la tutoyer... je sais c'était baveux) me demandes de prendre une tite-photo là là, du tit-papier pis de te l'envoyer par courriel??? On est au Québec, hein? Encore une fois, le système de santé fait des siennes... En même temps, c'est clair qu'il n'y en a PAS de système pour que l'on fasse vivre des idioties de même à des gens qui doivent voir de façon URGENTE un spécialiste...
La secrétaire était écarlate, les yeux un peu larmoyants.
- Écoute, je sais que ce n'est pas de TA faute... tu fais juste suivre les procédures... mais justement, tu ne les trouves pas niaiseuses, toi, les procédures? Tu la comprends, toi, la nuance entre un papier réel et une copie par fax ou par courriel? T'as pas envie d'utiliser ton intelligence pour dénoncer une telle situation à ton patron? Tu sais, tu as le pouvoir de réfléchir, d'agir et de proposer des solutions... La police ne viendra jamais t'arrêter parce que tu as mentionné un désaccord à une procédure... La "procédure" n'existe pas réellement... elle ne te mordra pas, tu sais, si tu décides de la confronter...
- Euh... je ne sais pas quoi vous dire... c'est de la faute à la clinique pédiatrique... ils ne connaissent pas nos procédures...
- !!! C'est pas sérieux ça non plus... "C'est de la faute à la clinique"... ben voyons, ça aussi, tu m'excuseras, mais c'est tellement québécois comme mentalité... C'est toujours de la faute aux autres... c'est de la faute au gouvernement si le système de santé ne fonctionne pas... c'est de la faute à Trudeau si on n'a pas assez de ressources dans les hôpitaux... Quand est-ce que les gens vont se décider à se relever les manches et à travailler ensemble pour agir et régler des problèmes simples??? Parce que là, le problème, il est simple... Appelle la clinique de pédiatrie et explique-leur les procédures afin que les patients ne se rendent plus ici pour rien...
- Ah non.. je ne peux pas les aviser... ça ne fait pas partie de mon travail...
- Aaaaah... wow... vraiment??? Écoute, je vais le faire "ton travail", et gratuitement, ben oui... je m'en vais de ce pas les aviser... ça va te sauver de l'énergie... après tout, moi, je ne travaille pas pour personne et je peux faire des besognes "hors de mon travail"... Je te souhaite une bonne journée... allez.
J'ai quitté le bureau avec un X-Boy qui rigolait et se faisait aller le jouet dans les airs. À l'intérieur de moi, ça tremblait. De découragement, de lassitude, de colère sombre envers des banalités qui font de la vie de trop de patients un enfer administratif.
J'ai rejoint X-Man dans le stationnement, lui ai "remis" X-Boy et lui ai annoncé que je retournais à la clinique pédiatrique pour régler un problème de procédures. X-Man s'est objecté.
- X-Mom... laisse faire... tu changeras pas le monde ce midi... et moi j'ai du boulot à faire, je n'ai pas le temps...
- Non. Non. Non. Pas toi aussi. C'est pas vrai que le "je n'ai pas le temps" va encore faire en sorte que les choses ne se règleront pas rapidement. Hey, on est ici, j'ai la "chance" de pouvoir mettre en lumière et peut-être régler un problème qui doit traîner depuis des lustres entre ces deux cliniques et tu voudrais m'en empêcher?
Je suis repartie telle l'éclair. Avec le tonnerre en mains sous forme de référence pour un spécialiste.
J'ai dû refaire la file pour l'ascenseur... car les règles sanitaires, celles-là, je ne les contourne pas.
Quand je suis arrivée à la clinique pédiatrique "sans X-Boy", la secrétaire m'a lancé un regard médusé.
- Rebonjour X-Mom... qu'est-ce qui se passe?
Et là, je lui ai expliqué la situation. Elle a lancé un :
- Ah eux autres... pus capable de leur niaisage... Vous n'êtes pas la première à avoir de la difficulté à obtenir un rendez-vous...
- Ok... je vois que ça fait un bail que ça traîne...
- En effet...
- Mais pourquoi vous ne discutez pas ensemble, les deux cliniques, pour vous entendre? Je ne comprends pas pourquoi ce sont les patients qui écopent de votre mésentente de procédures...
- Mmm... mais c'est parce que personne ne fait de plainte officielle et les pédiatres n'ont pas le temps de gérer ça...
- Ok. Eh ben moi, je vais vous en faire une, une plainte officielle.
- Vous feriez ça? Ça nous aiderait tellement...
- Ben voyons... bien sûr. Si c'est ça que ça vous prend pour bouger...
- Ah ben vous êtes la première à vouloir. Je vais vous chercher les coordonnées du chef de la clinique et donnez-moi également votre référence, je vais la faxer là là.
- Ok, merci. Mais vous voyez, si les pédiatres savaient CLAIREMENT que la référence doit être faxée ou envoyée par courriel, ils pourraient le faire a-u-t-o-m-a-t-i-q-u-e-m-e-n-t de la clinique et le patient n'aurait pas à subir ce genre d'histoire... c'est simple, non?
- En effet... il faudrait juste trouver le temps pour se parler.
- Ah le fameux temps... les gens ont perdu la notion "réelle du temps"... tout ne prend pas 13 heures à être effectué... Une telle information, ça se glisse au début ou à la fin d'une réunion d'équipe et zou, la situation sera réglée en moins de cinq minutes top chrono.
- En effet... vous êtes gestionnaire, X-Mom?
- Hein? Oh que non... je suis juste tannée... c'est parfois plus efficace qu'un titre et un diplôme...
***
En arrivant à la maison, j'ai saisi le téléphone et j'ai parlé avec le chef de la clinique. Il m'a expliqué que ce n'était pas la première fois qu'il entendait parler de la situation... Je lui ai demandé "combien de fois ça prenait pour que la situation soit réglée, au juste?". Il a bafouillé. Et dit qu'il allait en parler le soir-même à tout le personnel de la clinique. Il m'a remerciée et nous avons raccroché.
Je ne sais pas si la situation sera réglée sous peu.
Mais au moins, j'aurai permis au problème de se réserver une place dans le bal des dossiers urgents... du moins, j'ose l'espérer.
***
Hier soir, j'ouvre mon ordi et je lis un courriel. Un courriel provenant de l'école de X-Boy. Le directeur nous annonce qu'il y a un cas de COVID19 à l'école. Que la personne et les gens qui ont été en contact avec elles ont été mis en quarantaine. Mais que si nous recevons cette lettre, c'est que X-Boy n'a PAS été en contact avec la personne infectée et que tout est beau dans le meilleur des mondes...
J'ai repensé à la crotte d'oiseau sur ma planche ce matin...
Et je me suis dit que j'étais chanceuse...
Après tout, ça aurait pu être un caca de bernache...
Ou une fiente du système... tsss.